Le potentiel à produire un discours réflexif par la peinture est exploité, dans une approche concrète des procédés manuels, sans recours à des systèmes existants. Cette immédiateté n'est pas sans rappeler le côté « do it yourself ! » de la culture punk. Intervenir, remuer l'équilibre du paysage ; tout changement demande un rythme nouveau pour une modification profonde des états. Pas de nostalgie postmoderniste, mais un travail de collage et de transformation à partir d'éléments spatiaux temporels de provenances hétéroclites. Dans son laboratoire, le peintre bricole, depuis un chaos apparent d'images, un espace de sens, expérimente des mises en rapport, des rencontres.
La physicalité de la peinture ne cherche pas à recharger les images du réel perdu, leur caractère préfabriqué se voit gonflé des possibles de la peinture. Le geste au dessin, avec l'intuition comme déclencheur du processus opératoire, digère les figures, transfert les signes en motifs. Ils ne représentent plus, ils incarnent les personnages d'une nouvelle réalité. L'exercice ne tend pas vers le descriptif ou le narratif, il concentre une puissance d'action. L'indépendance acquise par les protagonistes de la composition n'est pas reprise, les motifs existent avec parfois même un don d'ubiquité à travers les toiles, voyageant d'une scène et d'une réalité à l'autre.
Le projet de l'entreprise picturale s'expanse encore lorsque certains dessins se muent en sculptures. L'idée du portrait se profile, référence aux tableaux et images intimes dans nos intérieurs, le motif devient acteur mémorable de l'univers du peintre. Les frontières établies sont sondées, l'espace pictural gagne l'espace réel et le contamine.
Anna Ozanna